Cher toi,
Pour une belle fête, ce fut une belle fête ! Tout le monde était sur son trente et un et les boubous paraient femmes et hommes à merveille. Le tout Niokokro était là et j’ai rencontré un monde fou. L’hôtel était magnifique : on avait dressé des tables tout autour de la piscine, des tissus multicolores les décoraient et des bouquets de fleurs tropicales les agrémentaient. Il y avait des lampions partout. Je suis fière de moi et Dominique m’a félicitée, je l’ai remerciée aussi de son aide. Tom et elle ne se quittent pas, cela fait plaisir à voir.
Mon idée de résidences pour les artistes et artisans du Mambo plaît beaucoup. Le ministre du Tourisme, dans un magnifique boubou blanc brodé d’or m’a présentée à tous les artistes du Mambo. Attention de ne pas me faire déborder ! Je n’ai pas envie d’aider ceux qui ont les moyens d’aller en Europe ou ceux qui y sont déjà allés. Mon idée concerne plutôt les artisans du village artisanal, ceux qui n’ont aucun moyen d’aller en Europe. Il m’a présentée aussi à une française, de la famille Martin Duchaussoy. Et oui, LES Martin Duchaussoy, cette famille richissime du nord. Ils ont un domaine à l’est du Mambo, un énorme parc où ils chassent et sont tranquilles. Mon idée l’a séduite et nous avons pris rendez-vous pour la semaine prochaine. J’ai l’impression d’avoir craqué une allumette qui allume tout un feu !
On a dansé, on a ri, on a bu, il y a eu les habituelles tombées dans la piscine, sans lesquelles une fête n’est pas une fête. Comme c’était l’ambassadeur d’Algérie qui invitait, je suis sortie du cercle franco-français qui m’insupporte. L’ambassadeur de France est venu mais n’est pas resté longtemps car il avait une autre fête organisée par le représentant de la Caisse Française de Coopération. On parlait toutes les langues à ma fête et cela m’a plu.
Il y a encore des invités, certains vont y passer la nuit. Moi je me couche, je suis fatiguée et surtout très excitée : Irène Martin Duchaussoy, avec qui j’ai terminé la soirée, est d’accord pour que je vienne shooter sa villa pour mon magazine ! Un beau reportage en perspective…
Voilà. Que d’émotions. Demain nous partons, Dominique et moi, en brousse. J’ai loué une Toyota, j’ai des cartes, des itinéraires, on part pour un beau voyage ! A la découverte du Mambo profond . Je suis si heureuse, tu manques juste à ma joie. Tu es en vacances, me dis-tu, la semaine prochaine : où iras-tu ? Dans ta famille en Dordogne ? Tu arrives au Mambo ? Une visite surprise ? Pourquoi pas ? J’adore les surprises ! La Dordogne, je connais un peu, c’est un beau pays avec de splendides châteaux, mais c’est un peu loin de la mer. J’y ai de la famille, ils avaient pour habitude d’organiser de grands mariages, avec église et grande réception. On y allait quand j’étais petite, c’était génial pour nous les enfants, on partait le matin impeccable et le soir nous retrouvait les vêtements en lambeaux, tout décoiffés et la figure et les mains sales. Mais qu’est-ce qu’on s’était amusés ! A l’un des mariages, il y avait une piscine et nous y avons passé la journée. Je me souviens qu’il y avait une grosse dame qui sautait dans la piscine et toute l’eau s’en allait ! Comme la piscine était en hauteur, elle arrosait les gens en dessous, costumes, capelines et belles robes.
4 heures du matin
Je me suis réveillée pour aller faire un tour dans l’hôtel. Tout est calme. De petits groupes restent à discuter mais il n’y a pas d’esclandre, ce que je redoute toujours en fin de soirée. Abdou m’a dit d’aller me recoucher, il veille. Le gardien est là aussi, il a sorti son arc et ses flêches, il me rappelle celui de notre villa à Abidjan. Il nous fallait faire attention quand nous rentrions tard de ne pas le réveiller, pour ne pas recevoir une flèche qu’on imaginait empoisonnée !
Dans le Beau Navire de Baudelaire, ceci :
Quand tu vas balayant l’air de ta jupe large,
Tu fais l’effet d’un beau vaisseau qui prend le large,
Chargé de toile, et va roulant
Suivant un rythme doux, et paresseux, et lent,
Je t’embrasse, Didier, ta Nadine
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